Le 2 août 1914, l’Allemagne envoie un ultimatum à la Belgique. Le lendemain, le gouvernement belge refuse avec fermeté, tandis que la Grande-Bretagne annonce que la violation de la neutralité belge constitue un casus belli.
Pourtant, le 4 août, vers 8 heures du matin, les troupes allemandes entrent en Belgique. La nouvelle n’est pas encore connue lorsque, à 10 heures, le roi se rend à la séance extraordinaire du Parlement. Sur le parcours, l’enthousiasme de la foule est indescriptible. Jamais un roi des Belges n’a connu une telle ferveur patriotique, un tel consensus populaire . L’accueil au Parlement est tout aussi chaleureux : le discours du Trône qui annonce la volonté de défendre la Patrie menacée est longuement ovationné par l’ensemble des sénateurs et députés. Le roi apparait au centre de ce sentiment de stupéfaction et d’indignation générales. Ainsi, la réaction de psychologie collective s’est faite. L’opinion publique belge, comme partout, soutient donc l’entrée en guerre et les sacrifices qu’elle implique.
L’âme belge, dont le Roi-Soldat est devenu l’icône, c’est l’Innocence bafouée et la fidélité au Droit, le Courage et l’Honneur, l’Héroïsme et le Martyre. Image d’Épinal, certes. Image dont la propagande alliée s’empare immédiatement, c’est vrai. Mais image qui permet aussi d’assumer des réalités de guerre particulièrement pénibles. Dans un premier temps, en tout cas, la propagande alliée est reçue en Belgique comme du pain béni : les Belges se voient internationalement exaltés, le refus de l’ultimatum allemand est légitimé et les sacrifices endurés au mois d’août justifiés. Les discours de Maeterlinck à Milan ou la lettre pastorale du cardinal Mercier sont reproduits sous le manteau et circulent dans le pays. Les civils belges, en particulier, deviennent le symbole même du martyre, la preuve de la « barbarie teutonne ». Pendant la guerre, d’ailleurs, des groupes de patriotes exaltés - surtout des bourgeois - cherchent à diffuser ces idées « patriotiques » contre le défaitisme, les défaillances ou les manques de solidarité. Car la guerre, contre toute attente, s’éternise.
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