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Fin 1914 : création du Comité national de Secours et d’Alimentation (CNSA)

Il s’agit d’un véritable Etat dans l’Etat mis en place dès la fin 1914-début 1915. La situation est que la Belgique occupée est prise entre le blocus économique allié et le refus allemand de contribuer au ravitaillement des territoires occupés, justifié par le blocus économique allié. Il fallait donc inventer de toutes pièces les instruments de la survie économique et quotidienne du peuple belge. Ce seront le Comité national de Secours et d’Alimentation (CNSA) en pays occupé, relié à la Commission for Relief in Belgium (CRB) dirigée par l’Américain Herbert Hoover à l’extérieur ; le tout sous la houlette des ambassadeurs neutres d’Espagne, des Pays-Bas et des Etats-Unis d’Amérique (jusqu’en avril 1917). Ces derniers jouent un rôle d’intermédiaire entre les belligérants et un rôle de garants des engagements pris.

Le CNSA est crée à la fin 1914 par les Belges Ernest Solvay et Emile Francqui : il aide et rassemble les comités de secours de toutes les régions du pays occupé. Le comité est composé de deux département : celui de l’alimentation (achat et vente de vivres) et celui du secours (qui vit sur les bénéfices du département de l’alimentation). C’est un système décentralisé, avec des comités provinciaux et locaux. Leur travail est basé sur des accords internationaux. Le problème, aux yeux des Britanniques, c’est qu’il ne faut pas que ces importations remplacent les produits belges saisis par les Allemands et encore moins qu’elles soient détournées au profit de l’Allemagne.


Le 16 octobre 1914, le CNSA obtient du gouverneur-général von der Goltz l’assurance que les vivres importés seront exclusivement à destination du peuple belge. Le 31 décembre 1914, le gouvernement allemand s’engage, près l’ambassadeur des Etats-Unis à Berlin, à interdire les réquisitions de vivres qu’auraient dû remplacer les vivres envoyés par la CRB. Mais, le Gouverneur-général von Bissing qui succède à von der Goltz va interpréter cet engagement de façon restrictive (refus de compter parmi ces vivres les pommes de terre, le sucre et l’avoine). La riposte ne se fait pas attendre : en décembre 1915, la Grande-Bretagne menace de suspendre le ravitaillement belge. Des discussions et des négociations aboutissent en avril 1916 et resteront la base des relations jusqu’à la fin de la guerre. Le gouverneur-général s’engage à interdire toute l’exportation de matière alimentaire belge. En échange, les Allemands en tant qu’individus peuvent acheter des produits alimentaires belges. Ce sera la porte ouverte à de nombreux abus. En plus, le CNSA n’a jamais obtenu le droit de distribuer les vivres belges. Les tentatives allemandes de mise sous tutelle du CNSA (via la présence de hauts fonctionnaires allemands aux séances des comités du CNSA ou via la reprise par la Croix-Rouge allemande des activités de secours comme la soupe populaire) sont permanentes, mais le CNSA résistera tout au long de l’occupation.


Si l’occupant, dont le ravitaillement des populations occupées n’est pas la priorité, a accepté la création de cette puissante institution, c’est par peur des troubles liés à la pénurie alimentaire qui se manifeste dès la fin de l’année 1914. Le CNSA, en effet, vit et agit en dehors du contrôle allemand. Toutefois, sa lutte contre le détournement des denrées et des vêtements envoyés par la CRB durera jusqu’à l’armistice et devint particulièrement âpre dans la seconde moitié de la guerre.